Mercredi 30 novembre 2011 à 15:57

Je t'aime avec un peu de haine, comme une petite bête un peu sauvage, un peu farouche, aux câlins brusques et au repli rapide. Parce que es traître et menteur, je te choisis aussi à cause de tes défauts. Moi j'ai besoin de me battre, je ne sais pas faire autrement.
Je vais devoir partir, bientôt, ce soir en fait, encore le train. Vous me croiserez à Montparnasse ou peut-être à Nantes, ou peut-être à ma destination finale. Ou sûrement pas.
Je suis incapable de rester où que ce soit, toujours portée par des désirs ou des obligations, toujours, et par-dessus tout ça, je t'aime, je me choisis quand même.
Je voudrais tellement que tout se passe bien pour les autres, je veux bien prendre n'importe quoi sur mes épaules, mais au moins la sérénité pour ceux que j'aime.
Mais peut-être qu'au final, dans la vie, tu ne gagnes rien si tu ne te laisses pas aider. Alors, fissurer ma forteresse d'orgueil, mais est-ce vraiment de l'orgueil ou le nom que je donne à ma peur ?
Il paraît que parfois le faible doit savoir se montrer fort...

J'ai les ongles courts alors je vais pouvoir porter un vernis rouge vraiment rouge. Rouge sang.

Je déjeune avec L' à midi, elle m'a tant et tant manquée, elle est si douce, si jolie, si franche, si fine. Un courant d'air rafraîchissant, l'effleurement d'une aile de papillon sur le revers de la main. Comprenez sa poésie, je vous en prie, la poésie d'une fille parfois absente et pourtant toujours présente. L' et sa douceur de boucles, L' qui peut tout avoir entre les mains si elle le choisit, car L' est assez forte, bien qu'elle ne le sache pas, et L' est si fragile à la fois. L' est un poème. On peut penser à Musset quand même : "Les plus désespérés sont les chants les plus beaux Et j'en sais d'immortels qui son de purs sanglots", puisque des fois, L' est aussi comme ça. Et pourtant. L'est tellement plus.

Et toi mon amant, je te revois dans quelques jours, mais pardonne-moi, je ne peux te dire quand.
Pardonne-moi pour tout ce que je ne dis pas, et cette distance parfois dans mes yeux, pardonne-moi.
Tu me manques si fort, ton souffle dans mon cou au creux de la nuit, et tes bras autour de moi.
Je vais revenir. Bientôt. Même si je ne serai probablement plus vraiment la même.
Pardonne-moi.

Samedi 26 novembre 2011 à 14:47

Toujours, partir, le vent dans les cheveux et les pieds ancrés à rien, pas même une ligne qui emmène. Des buts à courts termes, des TGV et des TER et des métros et des RER, je passe ma vie dans ces boîtes de métal, je passe ma vie à bouger mais ça ne mène à rien. Paris-Bordeaux, Bordeaux-Paris, Paris-La Roche s/ Yon, et pourtant nulle part je ne suis chez moi, au fin fond des vignes, au coeur de la banlieue ou au bord de la plage, je regarde autour de moi le vide.
Et je me dis, ainsi personne ne me donne envie de rester quelque part.
Vagabonde, je passe le temps, un peu ici, un peu là-bas, mais toujours ailleurs. Je froisse et jette mes billets sitôt contrôlée, et je n'attends jamais que qui que ce soit m'attende sur le quai. Oui, ces derniers temps vous avez bien plus de chances de me croiser seule sur le quai d'une gare, un gros sac à la main, la cigarette dans l'autre, qu'assise dans la pénombre d'un bar.
Solitaire, aussi. Les voyages forment la jeunesse et déforment les valises... Stupide expression, les voyages déforment ma jeunesse aussi, ma jeunesse que je perds, qui déborde et coule de mes paumes sans que personne n'en sache rien.
Retenez-moi.
Je repars dès mardi. Je vais décevoir tout ceux qui désirent que je reste, pourquoi ça ne suffit pas qu'ils veuillent que je reste, étouffant, voilà le terme, c'est étouffant, j'étouffe quand on m'enferme.
On est prisonnier de soi-même, toujours.
Ainsi, me croire libre et puis rien.

J'enverrai des messages de mensonge pour ne pas faire de peine aux gens, j'enverrai ces messages et partir encore me fera tant et tant de peine, parce que je ne sais pas pourquoi je fuis toujours, pourquoi j'ai mal quand on m'aime ou quand on compte sur moi ou qu'on s'inquiète pour moi.

Je ne laisse pas les gens m'aimer.

Sale gosse, encore. Morveuse.

Mercredi 16 novembre 2011 à 14:36

Enragée, je cherche à qui crier tout ce fatras, mais après tout, s'il n'y a pas de solutions, pourquoi se plaindre, pourquoi, j'ai mis toute ma vie en balance, encore une fois, je suis un peu con comme nana, et je mords les draps de rage la nuit, d'une rage franche et farouche.
C'est que tu vois nulle part je ne suis chez moi, c'est que je n'ai rien à moi.
J'ai les mains vides vides vides et je n'appelle pas pour ne pas me heurter aux absents. Piètre aventurière, effectivement. Là-bas je n'écris pas, ou si rarement, là-bas je ne fais que relire de vieux souvenirs et puis je regarde autour de moi encore et encore et encore et le vide et le silence m'abasourdissent. Comment, dis-moi, comment est-ce possible, sa vie en balance et rien sur l'autre plateau, de quel côté ça penche ?
Je me souviens de ceux que j'ai aimés, que j'ai tordus, que j'ai brisés, dans la réciprocité rassure-toi je m'en suis toujours bien sortie.
Cette nuit j'aurais voulu ta voix dans mon oreille, j'aurais voulu accrocher mes doigts peints à la réalité de ton épaule, arrêter de gémir et de suffoquer sauf sous le poids de ton corps, et l'angoisse sourde aurait cessé de ronger.
Cette nuit, la folie.

Je voudrais t'écrire des mots que je n'ai pas le droit d'écrire - décidément, le photographe et toi vous vous accordez bien pour ça. Pas le droit. Mais j'ai tous les droits si je le décide, vous le savez, ça.
Je voudrais t'écrire d'arrêter de mentir puisque je ne suis pas dupe, que je ne l'ai jamais été, puisque tu n'as existé que parce que j'avais peur du vide et de la solitude et que je déteste dormir seule et que le photographe m'avait laissée pour son rêve. Je voudrais t'écrire que quand je t'ai suivi ce n'était qu'un pari, rien d'autre qu'un pari.

Je me souviens de certains mots : "Ragazza, t'es glauque, t'es malsaine et si pure à la fois, ragazza, tu fais peur aux hommes, mais au moins tu es vraie."
Ca ne ressemble pas même de loin à des mots d'amour et pourtant.
"Tu es vraie."
Alors, tu me donnais ta réalité ?

Quand on se perd et qu'on devient cinglé, il n'y a qu'une chose à faire : cracher.

J'étais revenue pour trouver un endroit où je serais chez moi, mais je ne reconnais rien.

J'irai peut-être traîner dans les bars.

Mardi 15 novembre 2011 à 23:50

J'ai pris un billet pour Paris, il y a quelques jours, un aller-simple, pas de retour. Ce n'est pas que je ne compte pas rentrer. C'est juste que j'ai envie d'avoir cette possibilité de ne pas rentrer. Non pas qu'un billet m'oblige à prendre ce train, après tout, je pourrais en prendre un autre pour aller voir une connaissance ou l'autre dans je ne sais quel coin de la France. Non, c'est juste que j'avais profondément envie d'avoir cet aller simple, un aller simple comme une menace ou un espoir, j'avais envie de sentir que rien n'était joué.
Ce matin, je me suis levée tôt. Il faisait froid et je tremblais dans mon pull mince, je n'avais pas envie d'aller à la gare ou de dire au revoir, mais il y avait la réalité du billet dans ma poche, comme si c'était inéluctable, c'est débile, ce n'était qu'une feuille soigneusement pliée en quatre, on aurait même pas dit un billet. Au final, c'est trop con d'attacher autant d'importance à une feuille. Je suis quand même allée prendre ce premier train, jusqu'à Bordeaux. En pleurant, un peu, très vite. Et sans regarder par la fenêtre le long du quai, non, je regardais en face, de là où je m'étais installée, je ne voyais que le ciel, ça me convenait.
A Bordeaux, j'ai hissé mon gros sac sur mon épaule, la gauche, ça aussi c'est con, je suis droitière, mais je porte toujours tout ce qu'il y a de plus lourd du bras gauche. J'avais froid et je me suis quand même assise à une terrasse, tout en me maudissant. Il y avait de la place à l'intérieur, mais il y avait surtout trop de murs. J'ai commandé un café que j'ai laissé refroidir par inadvertance et un jus d'orange que je n'ai pas fini à cause de la pulpe. La serveuse de ce café n'est pas jolie, mais je la trouve chouette. Elle m'a appelée "ma belle", comme un réflexe, comme si je lui faisais penser à une fille qu'elle connaissait. J'ai ri, un peu, très vite aussi. Elle m'a rendu la monnaie, et quand elle s'est éloignée j'ai choisi une pièce, brillante, jolie, que j'ai laissée sur la table, un peu cachée sous la soucoupe, pour qu'elle pense que je l'avais oubliée là, comme ça, que je ne l'avais pas vue glisser.
Au bout d'un moment et de quelques cigarettes, je suis allée traîner dans la gare. De l'intérieur de la gare de Bordeaux, on ne voit pas bien les quais, on ne peut pas voir les gens qui se quittent ou qui se retrouvent, mon sac était trop informe pour m'asseoir dessus, et puis j'avais toujours froid.
Alors j'ai acheté un livre parce que j'en avais entendu parler, je ne me souvenais que du titre : L'Attrape-coeurs, de J.D Salinger. Ce titre, il traînait dans ma tête depuis un sacré bout de temps, il ressemble tellement à L'Arrache-coeur. Il y a des livres comme ça, je peux garder leur titre des années en moi sans jamais tenter d'imaginer leur contenu, ni essayer de les acheter, ni même prendre le moindre renseignement à leur sujet. Je sais qu'un jour je les lirai. Je l'ai vu, là, par hasard, au beau milieu des romans de gare, et je l'ai emporté, les gens faisaient la gueule, moi j'étais curieuse.
J'ai corné, comme toujours, les pages des passages que j'aimais. Je l'ai fini il y a à peine quelques minutes, c'est une édition bon marché et les pages se décollent déjà.
J'ai hâte de tomber comme ça sur Gatsby le Magnifique.

J'ai oublié de raconter ça aux Yeux Bleux. Pourtant, il me semble que c'est important, mais pourquoi, je ne sais pas.

Je sais juste que je suis la fille qui s'est barrée avec un gros sac et un aller simple pour d'obscures raisons.

Samedi 5 novembre 2011 à 11:10

 Je regarde des photos, prises dans un appart' dans le XIXème, et je me dis "On a l'air heureux" mais je me souviens que nous étions surtout défoncés. Il rit et je suis jolie, pourtant j'avais conscience du canal qui coulait en contrebas, ce canal sur lequel j'ai si souvent flotté avec le photographe. Je m'étais tue, bien évidemment, mais le canal restait là, présence familière au creux de moi.
Je me souviens je vivais encore à Paris, je me souviens des bars et des errances. Et des agonies, parfois un peu aussi.
Et si le photographe gueule assez fort, est-ce que j'entendrai encore ?

J'ai entamé une autre guerre qui ne me satisfait pas. 

L' s'étonne de mon silence et Angie se cogne à mon répondeur. J'aimerais qu'elles se disent : "Sale gosse" mais il n'en est rien.

<< Page précédente | 1 | Page suivante >>

Créer un podcast