Mardi 29 juin 2010 à 11:22

7h du matin dans Paris, les filles sont en bustier, je vois le génie de la Bastille au loin, encore ensommeillée. J'aime Paris tard dans la nuit et tôt le matin, le métro presque vide. Je suis le doudou des hommes, jeune, jolie, un peu trop fragile, un peu trop paumée, j'accueille leurs aveux et leurs confidences, je me repais des histoires des autres, sans indifférence mais en silence.
Le métro est plein de gens encore embrumés de sommeil qui me regardent des points d'interrogation dans les yeux, peut-être ma mini-jupe ou mes cernes je n'en sais rien.
Je suis dans le fond tellement jeune et le parais encore plus, on pourrait penser que je ne suis même pas majeure. J'ai toute la vie pour grandir. Tant pis pour tout ce que je brûle ou corromps, pour le regard et l'opinion des autres. Je m'en moque éperdument, je me fous de n'être qu'une fille, je me fous que ce ne soit pas politiquement correct. Je marche la tête haute, dans mon monde, et partout où je me sens bien je suis chez moi.
Je bois plus que les garçons, sors plus que les garçons, seule et vagabonde, certains croient qu'il faut partir loin, sans rien pour être libre, moi je pense juste que la liberté est intime et se vit intérieurement et qu'il y a des choses à découvrir même à côté de soi à condition d'ouvrir les yeux. Bien sûr parfois cela abîme, mais c'est un choix.
Il est tôt et je sens le regard des hommes sur moi, quelle importance ?
Certains me manquent parfois en plein milieu de la nuit, lorsque j'ouvre les yeux et soudain paniquée je songe : "Je voudrais qu'il soit là." mais je me rappelle ensuite qu'il fait partie de ceux qui ont peur de moi.
Casper a disparu sans un mot sans un geste, juste d'un seul coup il n'était plus là. Alors peut-être bientôt le vide autour de moi, je ne suis pas celle que l'on retient. Un jour pourtant j'aimerais être celle que l'on appelle entre toutes, celle dont un sourire éclaire les yeux de quelqu'un d'autre.

Jeudi 24 juin 2010 à 8:42

Toujours cette manie étrange de vivre plusieurs vies en une seule, de dormir 2h par nuit, une sieste à peine, et de repartir. Je rentre de Paris le matin et je me faufile dans le lit d'Angie, je pose ma tête sur l'oreiller et je murmure jusqu'à m'assoupir à moitié, alors je me secoue, je m'ébroue, et je prends le petit déjeuner avec elle, je repars pour ma maison vide, juste le temps de prendre une douche, de chercher du travail, de me faire un peu jolie et de repartir, j'arrive forcément un peu plus tard qu'on ne m'attendait, essoufflée, souriante, surprise de les voir heureux quand je leur crie simplement "Hé ! C'est moi !" et après avoir claqué la bise à tout le monde qui me demande toujours quand je reviens travailler, nous allons nous poser au bar à l'angle de la rue et nous vidons des pintes.
Alors parfois, en équilibre comme ça, le sourire me vient spontanément aux lèvres, je m'anime, parle avec les mains, avec les yeux, et il n'y a plus de place ni pour la tristesse, ni pour le doute.
Je les vois bien, les cernes sous les yeux, et je l'entends bien, ma voix cassée par l'alcool et les cigarettes, et la blancheur de ma peau. Mais je me dis que si c'est ça, le prix du bonheur, alors je le paye avec joie, pour le bonheur de me sentir si libre quand je claque la porte de chez moi sans savoir quand je vais y revenir, sans savoir où je vais finalement dormir, Paris, Montreuil ou Vincennes, si il y a un canapé et une couverture ça me suffit bien.

Mercredi 23 juin 2010 à 17:48

Je tourne les pages, je recommence.
Bastille, Hôtel de Ville, Place de la Contrescarpe, Rue Mouffetard, St Michel. Errances nocturnes.
Un garçon m'a dit ce que j'ai attendu qu'on me dise une bonne partie de ma vie. Un garçon quasi inconnu.
Ce moment que lui et moi avons vécu, je le souhaite à tout le monde, car nous avons baissé les armes et ôté nos armures sans nous connaître, une respiration, une trêve, un gouffre de tendresse au bord duquel nous avons eu le vertige, puis dans lequel nous avons plongé, immergés, cachés au monde, protégés de rires de regards et d'effleurements soulageant bien plus que tous les serments du monde. Il est un voyageur qui repartira bientôt aux Etats-Unis, seul, juste le billet d'avion dans sa poche et le sac à dos sur les épaules, toujours perdu dans des contrées insoupçonnables. Il est un point d'interrogation, questionnant le monde sans insolence mais non sans révolte.
Ses cheveux si courts et pourtant plein d'épis lorsqu'ils ne sont pas coiffés, son regard franc mais parfois timide, sa douceur, sa tendresse maladroite, sa pudeur, ses gestes qui me surprennent, sa façon d'un seul coup de poser sa tête sur mon épaule et de se taire, et son sourire. Des questions fragiles au fond des yeux parfois, sa bouche qui vacille dans une hésitation, pas même une seconde, ces expressions furtives et fugitives.
Il doit être de l'eau qui coule entre les mains, dont on ne peut qu'apprécier la fraîcheur et la douceur, l'eau qui fait tant de bien lorsqu'on est écrasés par la chaleur immobile de l'été, la pluie d'orage.
Il fait partie de ceux qui choisissent leur cage que l'on doit toujours laisser ouverte.

Jeudi 17 juin 2010 à 11:07

J'entends ses chuchotements, j'entends ses mots qui parlent de douleur, d'opération, je l'entends lui, j'entends son âme dans sa voix, j'entends ses mots d'excuses, ses mots gentils, je l'entends fragile.
Je m'entends lui dire que je ne lui en veux pas et qu'il n'a pas à s'en vouloir.
Je me dis, devant mon café refroidi, au détour d'une phrase, que moi aussi je pourrais tout plaquer si il me disait "Viens.", sans une hésitation, sans demander d'explications, un acte de foi.
Il me dit qu'il a déçu trop de gens, qu'il est désolé de tout le mal qu'il a fait, est-ce que les personnes lui laisseront une seconde chance ?
J'entends ses murmures et tout ce qu'il y a derrière, tous les mots qu'il ne dit pas, j'entends sa maladie, j'entends la solitude et la tristesse. J'écoute chacun de ses rires, chacun de ses mots, chacun de ses silences. Je mobilise tout mon être pour mieux l'écouter, mieux le comprendre, mieux le retenir.
J'ai envie de lui dire, tu sais notre histoire elle a rien eu de dégueulasse, notre histoire elle peut rendre jaloux le monde entier, parce qu'on s'est tant et tant aimés. Et rien que parce que tu as pu m'aimer comme ça et que je t'ai aimé comme ça, tout le monde doit te donner ta chance, parce que quand on est capable de tellement d'amour on ne peut pas être si mauvais.

Lundi 14 juin 2010 à 12:22

On escalade pour se percher sur une plate forme pour manger une pizza, on se pose dans un canapé en buvant du rhum quand il fait trop chaud, Hendrix le chien nous saute dessus et nous écoutons Foxy Lady.
Il me regarde et me sourit de ses yeux verts, et les petites tâches marrons à l'intérieur qui tremblotent comme une flamme légère.
J'ai une migraine, je m'en moque. Je suis bien, peut-être un peu fatiguée, un peu soucieuse, mais je fais comme si il n'y avait pas de soucis. Pas le samedi soir, jamais le samedi soir.
Je l'ai quitté ce matin, trop tôt à mon goût, je le quitte toujours trop tôt. Je grimpe dans le bus, je me pose contre la vitre, je croise à l'occasion son meilleur pote qui me donne des coups de poing dans l'épaule, je ris.
Nous sommes des clichés ambulants. Le seul qui n'est ni piercé ni tatoué, c'est Casper. Mais lui il se trimballe avec le gros chien, croisement de berger allemand et de beauceron. Ils ont bien évidemment monté un groupe, ceux qui ne fument pas picolent comme des trous, et ceux qui fument aussi. On traîne bien évidemment dans les endroits sombres où l'on ne risque pas de croiser les flics, on hurle de rire en plein milieu de la nuit, comme si toute la ville nous appartenait. L'illusion, si fugace, d'être libres et éternels.
Est-ce que ça fait notre force ?
On ne cherche pas à changer le monde. On veut juste être heureux.
J'aime bien les regarder, lui et son groupe de potes. Ils sont là à veiller les uns sur les autres, à se blottir parfois en tas, à se chatouiller, on voit ce besoin d'être proches. Ils ont autant besoin d'être collés que je ne supporte pas qu'on me le fasse. Je n'ai pas envie de faire partie de leur groupe. J'aime les regarder, être en périphérie, les écouter. Je n'ai pas de groupe de potes, juste des gens qui ne se connaissent pas nécessairement entre eux et qui n'ont été réunis qu'en de rares occasions. J'aime pouvoir aller des uns aux autres sans que tout le monde sache nécessairement ce que je fais entre temps. J'aime être libre.
J'aime ses yeux verts le matin, et ses bras autour de moi, nos mains enlacées et nos jambes emmêlées.

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