Mardi 30 mars 2010 à 20:34

Ce soir, je retourne dans la morgue.
Ca fait tellement longtemps qu'on se cuite, elle et moi. Qu'on essuie calmement nos larmes, qu'on ne se prend pas dans les bras, qu'on ne se fait pas de serments.
On se laisse porter. Elle, chômeuse, moi étudiante si peu assidûe.
On rit de ce qui fait peur. On rit de ce qui fait pleurer. On rit de ce qui fait mal. On rit de nous.
J'entends ma mère chanter, sa jolie voix qui monte si haut, douce et forte. Je suis assise dans le noir. J'aime l'écouter chanter quand elle ne sait pas que je l'écoute. Même si je n'aime pas ce qu'elle chante, je n'écoute pas les paroles, juste sa voix, claire.
Tant pis pour le temps qui passe, pour ce que je me fais, ce que l'on se fait. Tant pis si l'on se perd. Il y a des instants comme ça. Juste une voix.
J'assume mon côté masochiste. J'assume de me perdre.
On peut vivre comme ça.
On peut vivre sans croire en rien, et prendre la vie comme un vaste terrain de jeux. On peut être traître et crever d'amour, être fort et fragile, on peut vider des litres et des litres de bière et aller travailler, on peut détester son corps et le décorer de piercings et de tatouages, on peut détester la vulgarité et être vulgaire, avoir cours et traîner des heures entières dans une librairie, assise en mini-jupe sur les marches, le nez dans un bouquin. On peut ne pas se trouver jolie, et porter du rouge à lèvres voyant. On peut faire croire ce que l'on veut à qui l'on veut.
On peut n'en avoir aucun remords.
Et aimer passionnément la liberté.

Lundi 29 mars 2010 à 12:14

Je suis toujours la plus jeune, la plus à l'aise au milieu des hommes.
Je suis celle qui trahit et qui ment.
Mais, après tout, n'est-on pas là pour ça ? Je le garde au fond du coeur, il est comme le feu, il me brûle et cautérise mes plaies, je voudrais toucher sa peau à m'en user les mains.
Sa peau trop blanche et ses cernes violettes, ses crocs, ses cheveux blonds, ses yeux si bleus. Son dos trop raide, sa douleur, ses larmes, ses bras...
Comment ne pas me faire traître quand il est derrière chacun de mes gestes ?

Mardi 23 mars 2010 à 13:50

Vous êtes magnifique, sexy, et votre mec vous fait cocu. Franck ! Champagne pour les demoiselles ! C'est son anniversaire !
Maintenant tu me laisses partir. TU ME LAISSES PARTIR J'AI DIT.
T'as peur. T'as trop peur de tout.
Fais chier, merde. C'est le dernier verre que je te sers, t'es bourrée. Sans dèc' ? On ne pouvait s'attendre à autre chose à faire autant de mélanges... Bière, vin, champagne, rhum, et re-belote, bière, vodka, champagne, whisky. On est pas des princesses, nous, quand on lève le coude pour s'envoyer nos shooters au fond de la gorge, on ne fait pas la grimace en déglutissant.
Tant pis si il faut passer pour des putes pour délester un sombre conard de son fric, si il faut faire des moues et des simagrées pour que le verre sur la table ne soit jamais vide, sous l'oeil attentif du barman qui vérifie que le sombre conard en question n'aille pas trop loin.
On m'invite au resto, on m'offre du parfum, du champagne, on me donne de l'argent, on me propose même du travail. Tout le genre de choses que je n'ai pas réellement mérité, en fait.
Et tous ces cadeaux ne pèsent pas lourd face à celui de L', dans un papier un peu froissé. Dessus il y avait une carte postale, et derrière elle y avait écrit, entre autres :
"Non je ne pleure pas
Je chante et je suis gai
Mais j'ai mal d'être moi
Ami, remplis mon verre"
Brel - L'Ivrogne

Et dans le papier cadeau, il y avait un livre. Il y avait L'insoutenable légèreté de l'être. Et, en l'ouvrant, il y avait encore quelques lignes de sa main :
"Pour une vraie fausse fuite. Ou une fausse vraie fuite. C'est selon.
"Celui qui veut quitter le lieu où il vit n'est pas heureux." Milan Kundera
Pour nos amis les mots.
Et nos mensonges.
Et les manipulations.
La faiblesse.
L'insoutenable légèreté de l'être, quoi.
Bon anniversaire"


Et si la vie n'est qu'une putain, je la baiserai jusqu'à l'éventrer.

Samedi 20 mars 2010 à 12:06

Je suis de retour.
J'ai trahi, menti, fui, mené une double, voire une triple vie.
Je me suis rendu compte du terrible pouvoir de la parole, et du silence. C'est si facile de mentir.
Princesse sur un lit, défoncée, sirotant une bière, et la déception au fond du ventre. Ce n'était pas ce que c'était supposé être.
Je n'ai toujours pas écouté les 10 messages sur mon répondeur. Je sais que je ne les écouterai pas. Parce que je n'en ai rien à foutre, parce que je n'étais pas là, parce que je ne suis plus là, parce que ces messages demanderont tous : "Où es-tu ? Pourquoi tu ne donnes pas de nouvelles ?" et que je ne me justifierai pas.
Je n'avais juste pas envie.
Je voulais juste oublier le monde.
Il faisait toujours chaud dans l'appart', à cause des plantes. J'errai en mini-jupe et débardeur quand il était en cours, mes cheveux mouillés gouttant le long de mon dos. Une bière, une clope, un bouquin. Quand il rentrait, je le regardais, ses yeux verts et ses cheveux châtains bouclés, je le regardais et je savais que je mentais.

Samedi 13 mars 2010 à 11:21

Sa voix qui rit, lointaine.
J'imagine ses yeux qui se plissent et ses fossettes, ses canines de vampire, coupantes comme des lames de rasoir, des dents qui laissaient des marques rouges sur ma peau mate.
Il dit qu'il viendra me voir à Paris.
Je ris.
Blondinet, saloperie.
Toi et moi, on formait un couple homosexuel. Tu étais l'homme qui aimait parfois les hommes, et moi la fille la plus couillue de ton univers. Un putain de couple.
Pour toi, j'étais un abri, un refuge, un exutoire, un instrument de torture. Seulement pour toi.
J'étais celle qui te déchirait, qui te soignait, qui t'aidait quand tes os te faisaient trop mal pour que tu puisses bouger, celle pour qui tu pleurais.
Tu m'aimes encore. Je t'aime encore.
Tout ce que je ne donnerai pas aux autres, car ce serait te trahir. Et te trahir, c'est me trahir.
J'erre dans Paris, cette ville qui, tu as raison, ne te va pas. Paris ne t'irait bien que la nuit, sur le Pont Marie. Paris ne t'irait bien que pour te noyer dans la Seine, Paris ne te va bien que pour les manèges de fête foraine, quand tu saisis la main d'une brune orgueilleuse, timide et apeurée.
Blondinet, ta guitare à la main, loin. Je t'aime davantage dans ta liberté.
Tu vis sur la même terre que moi, tu respires le même air que moi, et je sais que tu existes. Cela me suffit.
Blondinet, mon Prince désarmé, désenchanté, décharmé.
Ton souvenir me fait sourire.

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