Des histoires commes les autres. Banales.
Pourquoi les miennes plutôt que celles d'une autre ? Ce ne sont pas mes oignons.
En vérité, très peu de choses me regardent vraiment. Du moins, c'est ce que je considère.
Plaque-moi. Ce n'est pas mon problème. C'est même confortable. Je n'ai pas de décision à prendre, ainsi. C'est gentil à toi de m'éviter les regrets, les remords, et tout ce genre de choses.
Je suis lâche, je n'ai jamais prétendu le contraire, je l'ai même toujours affirmé. Il n'y a pas de gloire dans la fuite, mais c'est tellement plus agréable. Se sentir pousser des ailes. C'est tellement mieux de faire son petit bonhomme de chemin en toute clandestinité, et de n'avoir que soi qui sait à quoi s'en tenir.
Et parfois en trembler la nuit. Parfois en sourire fièrement, orgueilleusement, être au milieu de ceux qu'on aime et pouvoir penser : "En définitive, vous ne savez presque que le meilleur de moi, et c'est mieux ainsi." Quoiqu'on puisse en penser, c'est une manière d'aimer.
Vous comprenez, ce n'est pas mon problème, ce qu'on me fait ou pas. Ca ne change pas si facilement que ça ce que je suis.
Dimanche 20 avril 2008 à 19:22
Dimanche 20 avril 2008 à 18:04
Une nuit et une journée de rien tellement douces et faciles et reposantes. Un demi face à Notre-Dame, pause cigarette au bord de la Seine, et le soleil qui réchauffait tout doucement par moments. Bizarrement avec P. le rire est venu aussi facilement qu'avant. J'avais cru qu'il y avait plus d'eau qui avait coulé sous les ponts, et non,et cela fait partie des bonnes surprises. La Trêve, vraiment, encore mieux que ce que je pensais lorsque j'ai écrit mon dernier article. Et la semaine à venir s'annonce tout aussi douce et tranquille. Un petit cocon douillet, finalement, et on verra plus tard pour le prochain round. Pour l'heure, je suis apaisée et rassurée, et, oserai-je le dire ? Allez, je me lance : je suis heureuse.
Jeudi 17 avril 2008 à 10:53
Depuis le retour de mon fabuleux week-end, la vie n'a pas vraiment été de tout repos, et j'ai été surprise que Camus ne suscite aucun commentaire. (Camus, mon dieu, CAMUS !) Sinon, je me suis fait virer de chez moi, j'y suis retournée, j'ai bossé un peu plus que de raison, j'ai failli me faire plaquer et j'ai dormi en moyenne cinq heures par nuit (sauf cette nuit, heureusement). J'ai donc totalement pris mon pied. Il y a eu aussi le retour de P., L. et ses conneries, Cl. et sa nonchalance, R. et son joli regard, D. et ses si rares sourires. Et Jésus à genoux sur le quai du RER et Godwill l'anglais qui tenait absolument à m'appeler Rose.
Il fait beau et frais et le cerisier est en fleurs, et il y a enfin une Trêve dans toute cette galère, et cela fait du bien de s'arrêter, de s'expliquer et de respirer. Juste pour mieux repartir. Juste une toute petite pause, histoire de retrouver un peu de légèreté après ces douze jours.
Lundi 14 avril 2008 à 10:59
Dans l'air gelé du mois de mars, malgré le printemps, seuls restaient la rage, l'amertume et les regrets, mais il n'était plus temps de se plaindre, mais de faire face. Malheureusement le courage avait déserté les cœurs, et l'envie d'être heureux ne parlait plus à personne. Il s'agissait seulement d'être moins malheureux, de se raccrocher bien fort au peu que l'on avait, de serrer les dents et de sourire. Certains se disaient même qu'à force d'avoir voulu vivre et non se contenter d'exister, ils avaient tout perdu d'eux-mêmes. Ils décrétaient alors sentencieusement qu'il était temps d'être "raisonnables" ; ainsi l'Humanité se vautra un peu plus largement dans sa médiocrité, et les consciences furent soulagées du poids d'être soi. Malheureux, mais raisonnables, tous se sentaient à leur aise dans leur fange lâchement justifiée. De plus, personne n'étant mieux lotis que les autres, les hommes et les femmes s'assoupirent bien tranquillement dans leur bonheur en toc.
Et oui, moi aussi, je suis méprisante, mais voyez-vous, malgré le fait que ce que j'écris ne soit pas toujours joyeux, j'aime la vie, le bonheur, les éclats de rire. Je méprise ceux qui ne voient pas que la vie peut être plus extraordinaire, et que cela dépend seulement de la manière dont on voit les choses, des souvenirs que l'on garde et de ceux que l'on choisit d'ignorer, de cacher au fond de son cerveau. Bien sûr, certains ont leurs raisons. Mais je parle des autres. Tout ira mieux car tout va déjà mieux, il suffit de se botter un petit peu les fesses. Pourquoi se contenter d'être soi ? Pourquoi ne pas aspirer à plus ? Pourquoi ne pas avoir un idéal qui parle de Vie, dans tout ce qu'elle a de beau et de laid, d'intense ? Vivre, enfin, et aimer. Parce que ça ne coûte rien, juste un peu de temps. Et que l'on a tout notre temps.
Samedi 12 avril 2008 à 11:55
J'ai même gardé au héros des Justes, Kaliayev, le nom qu'il a réellement porté. Je ne l'ai pas fait par paresse d'imagination, mais par respect et admiration pour des hommes et des femmes qui, dans la plus impitoyable des tâches, n'ont pas pu guérir de leur coeur. On a fait des progrès depuis, il est vrai, et la haine qui pesait sur ces âmes exceptionnelles comme une intolérable souffrance est devenue un système confortable. Raison de plus pour évoquer ces grandes ombres, leur juste révolte, leur fraternité difficile, les efforts démesurés qu'elles firent pour se mettre en accord avec le meurtre - et pour dire ainsi où est notre fidélité.
DORA
Jolie ! Je serais contente de l'être. Mais il ne faut pas y penser.
KALIAYEV
Pourquoi ? Tes yeux sont toujours tristes, Dora. Il faut être gaie, il faut être fière. La beauté existe, la joie existe ! "Aux lieux tranquilles où mon cœur te souhaitait...
DORA, souriant
Je respirais un éternel été..."
"Non. Je sais ce qu'il pense. Schweitzer le disait déjà : "Trop extraordinaire pour être révolutionnaire." Je voudrais juste leur expliquer que je ne suis pas extraordinaire. Ils me trouvent un peu fou, trop spontané. Pourtant, comme eux, je puis être adroit, taciturne, dissimulé, efficace. Seulement la vie continue de me paraître merveilleuse. J'aime la beauté, le bonheur ! C'est pour cela que je hais le despotisme. Comment leur expliquer ? La révolution, bien sûr ! Mais la révolution pour la vie, pour donner une chance à la vie."
DORA
Eh bien, voilà trois ans que j'ai peur, de cette peur qui vous quitte à peine avec le sommeil, et qu'on retrouve toute fraîche au matin. Alors il a fallu que je m'habitue. J'ai appris à être calme au moment où j'ai le plus peur. Il n'y a pas de quoi être fière.
ANNENKOV
Sois fière, au contraire. Moi, je n'ai rien dominé. Sais-tu que je regrette les jours d'autrefois, la vie brillante, les femmes... Oui, j'aimais les femmes, le vin, ces nuits qui n'en finissaient pas.
DORA
Je m'en doutais, Boria. C'est pourquoi je t'aime tant. Ton coeur n'est pas mort. Même s'il désire encore le plaisir, cela vaut mieux que cet affreux silence qui s'installe parfois à la place même du cri.
STEPAN
Tu es une femme et tu as une idée malheureuse de l'amour.
DORA, avec violence
Mais j'ai une idée juste de ce qu'est la honte.
"Tout à l'heure ? Oui, j'oubliais... (Elle rit comme si elle pleurait.) Non, c'est très bien, mon chéri. Ne sois pas fâché, je n'étais pas raisonnable. C'est la fatigue. Moi non plus je n'aurais pas pu le dire. Je t'aime du même amour un peu fixe, dans la justice et les prisons. L'été, Yanek, tu te souviens ? Mais non, c'est l'éternel hiver. Nous ne sommes pas de ce monde, nous sommes des justes. Il y a une chaleur qui n'est pas pour nous. (Se détournant.) Ah ! pitié pour les justes !"
Je ne suis pas votre ennemie.
KALIAYEV, avec désespoir
Vous l'êtes, comme tous ceux de votre race et de votre clan. Il y a quelque chose de plus abject encore que d'être un criminel, c'est de forcer au crime celui qui n'est pas fait pour lui. Regardez-moi. Je vous jure que je n'étais pas fait pour tuer.
(...)
LA GRANDE-DUCHESSE
Il n'y a pas d'amour loin de Dieu.
KALIAYEV
Si. L'amour pour la créature.
LA GRANDE-DUCHESSE
La créature est abjecte. Que faire d'autre que la détruire ou lui pardonner ?
KALIAYEV
Mourir avec elle.
LA GRANDE-DUCHESSE
On meurt seul. Il est mort seul.
KALIAYEV, avec désespoir
Mourir avec elle ! Ceux qui s'aiment aujourd'hui doivent mourir ensemble s'ils veulent être réunis. L'injustice sépare, la honte, la douleur, le mal qu'on fait aux autres, le crime séparent. Vivre est une torture puisque vivre sépare.