Et quand tu partiras, que restera-t-il à dire ?
Il y aura le désert de l'hiver, l'impossibilité de t'imaginer, et le monde entier continuera de tourner.
C'est dingue comme on croit tous nos histoires uniques, extraordinaires.
Trois semaines, une volée de jours.
Et des mois derrière que rien ne peut résumer, aucun mot, à part peut-être un rire fragile comme le tintement d'un grelot.
Notre possessivité dévorante. On ne se voit plus que tous les deux, dès 16-17h, dans le noir de ton appartement, et la vie qui tourne autour, qu'on entend, mais qui nous est étrangère. Toutes ces heures à lover mon corps contre le tien, et à sentir tes bras se refermer sur moi.
Notre possessivité malsaine. Ce monde dans lequel on ne peut qu'à peine se regarder, qu'à peine s'effleurer, et jamais jamais s'embrasser, ce secret qui nous a lié. On ne nous voit plus ensemble dehors.
Ton corps, si parfait. Ta peau douce, ton sourire d'enfant, ton rire un peu rauque, la moquerie au fond de tes yeux.
Tu vois, je sais qu'il n'y a pas de mots pour dire l'absence et la frustration, le désir et le manque.
Je suis restée là, sage, patiente, docile.
J'ai finalement ravalé ma fierté, et j'ai confiance en toi.
Tu t'en vas.
On a jamais été capables de dire les bonnes choses au bon moment, on a toujours navigué à l'intuition, on a évité les écueils grâce à une confiance aveugle et inconsciente, on s'est tendu des perches en forme de sous-entendus quand on se noyait, mais jamais, jamais, nous n'avons été capables de dire une phrase plus forte que : "Je me sens bien." ou "J'ai envie de dormir avec toi.", et même pour ça, il nous a fallu des mois.
Bien sûr, tu m'as fait des tonnes de compliments, mon cul, mes seins, mes hanches, ma nuque, ma bouche, mes yeux, mon humour, ma candeur, ma liberté, et même ma colère et ma mauvaise humeur, tout y est passé. Mais ce n'est pas ça que je garderai.
Je garderai ton air gêné et perplexe, quand tu m'as dit sans savoir ce que cela signifiait : "Je sens ton odeur sur moi, même quand tu n'es pas là."
Je garderai la fois où tu t'es retourné vers moi avec un demi-sourire, torse nu dans la pénombre, et tu étais tellement beau que j'en étais perdue.
Je garderai la douceur de tes caresses dans mes cheveux, et l'image de nos doigts entremêlés.
Et ton odeur.
Il nous reste trois semaines, et tu t'en vas.
Les mois passeront ensuite, tout doucement, ils passeront sans que l'on s'en rende compte, ils s'écouleront parce que le temps est indifférent, il se fout que les amants veuille le retenir entre leurs doigts pour quelques heures et l'accélérer pour quelques mois, le temps se fout de la douleur et de la séparation comme du bonheur et de la joie dévorante.
Je voudrais te mettre un collier et une laisse, mais je te laisse partir.
Au bout d'un moment, tu seras de retour.
Je ne serai peut-être plus une princesse, alors, peut-être que je ne dirai plus des choses bizarres comme : "J'en ai assez de mes cheveux, s'il te plaît, rase-moi le crâne." et toi tu seras peut-être un peu plus calme, et tu ne diras plus que tu pisses au cul du monde entier.
Ou peut-être qu'on ne sera pas si différents.